Eté 1936 : les premiers congés payés

Le 03 Août 1936, Paris

Mon cher Paul,


c’est ta grande sœur qui t’écrit, comment vas-tu ? Anne se porte bien ? Et Henri, votre charmant petit garçon, mon neveu, quel âge doit-il avoir maintenant… Trois ans, il me semble. Va-t-il donc à l’école ?

Désolée, je m’emporte avec mes questions, mais ma joie ne peut être contenue plus longtemps, car vous le savez sûrement, grâce aux accords de Matignon signés en juin dernier, nous pouvons désormais partir en vacances ! D’ailleurs un grand merci au Front Populaire et à Léon Blum pour ce miracle. Ce sera la première fois pour nous ! Nous reposer et partir, à la mer ou à la montagne… D’après les accords, les congés durent deux semaines. Deux semaines ! Et ils sont payés !

Ah, vous auriez dû voir la tête de mon patron, M.Richard. Il était fou de rage et un jour que l’on passait devant son bureau avec Michelle, nous avons pu l’entendre parler au téléphone avec sa femme. Il disait quelque chose comme ça :  » Chérie, as-tu vu ces nouveaux accord, quelle bande d’escrocs j’te jure ! Maintenant on va devoir payer ces minables alors qu’ils se la coulent douce. Mais imagine sur les plages, imagine que l’on croise Danielle, notre femme de ménage ! Ou Gérard, le cuistot ! Cela pourrait arriver et je ne supporterai pas de les voir en jupette ou en caleçon de bain avec nous. « 

Cela nous a bien fait rire, c’est une bonne chose pour nous, la classe moyenne. La meilleure qui pouvait m’arriver. J’attends avec hâte de tes nouvelles et que l’on se retrouve enfin, je t’embrasse.

Ta Fanny

Le point d’histoire : En France, les premiers congés payés (jours de repos des salariés payés par l’employeur) sont apparus pendant l’été 1936, après la victoire électorale du Front Populaire, dirigé par Léon Blum. La durée des congés payés était de deux semaines. Avant 1936, seuls les travailleurs indépendants, les rentiers et les commerçants prenaient des congés (qui étaient non payés). La plupart des ouvriers ne pouvaient se reposer que le dimanche. Cela changea radicalement la vie de plus de 600 000 ouvriers et leurs familles ont donc pu partir en vacances pour la première fois de leur vie.

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