De nombreux anciens combattants expriment la violence de leur expérience combattante au travers de l’art. Déjà présent dans les tranchées, l’art se développe chez les poilus après la guerre, avec notamment des artistes tels que Otto Dix, Maurice Genevoix ou Henri Barbusse.
La Grande Guerre étant une guerre de position, les soldats ont passé de longues heures dans les tranchées, dans l’attente d’une offensive. Ce temps a le plus souvent été passé dans une inquiétude et une mélancolie constante mais bon nombre de soldats ont mis ce temps au service de l’art, en détournant l’équipement militaire en réels objets d’agrément, pour envoyer à leurs familles ou offrir à des camarades.
L’artisanat des tranchées a révélé la fibre artistique de nombreux soldats, sculptant des douilles, fabriquant des briquets à l’aide d’objets détournés, gravant les gamelles.
« Ces productions ne témoignent pas seulement de l’habileté manuelle et de l’ingéniosité infinie des hommes ordinaires. Elles sont autant de protestations contre la laideur, contre la bêtise guerrière, contre l’absurdité du sacrifice. »
Jean-Claude Guillebaud, préface à De l’horreur à l’art : dans les tranchées de la Première Guerre Mondiale, de Nicole Durand. 2006. Certains poilus avaient déjà pu exprimer leur art lors de leur passage au Poilu-Palace de Dijon, en réalisant des dessins du front, de leurs camarades ou même des autoportraits. Si l’art était présent dans les régiments français, certains poilus, après la démobilisation se sont entièrement consacrés à l’art. Maurice Maréchal est un poilu dijonnais de renommée internationale. Violoncelliste, premier prix du Conservatoire de Paris en 1911, il est mobilisé en 1914, à 22 ans. Au cours de sa première année au front, ce mélomane ne peut se passer de musique. Avec l’aide de ses camarades Plicque et Neyen, tous deux menuisiers, il confectionne en 1915 un violoncelle à l’aide d’une caisse de munitions et de morceaux de porte en chêne. Cet instrument qui fait la guerre avec lui, est baptisé « Le Poilu ».
Le soldat Maurice Maréchal a pu s’exercer pendant les longues journées d’attente d’une offensive dans les tranchées, pour ainsi jouer lors des cérémonies militaires et religieuses. Son talent et l’histoire extraordinaire de son instrument le mènent à jouer pour les plus hauts gradés, Foch, Mangin, Gouraud, Joffre, et Pétain qui ont ainsi gravé leur signature sur le bois de l’instrument.
Après la démobilisation, Maurice continue les concerts dans le monde entier, toujours avec “Le Poilu” puis, après sa carrière de concertiste, Maurice Maréchal enseigne au conservatoire de Paris de 1942 à 1963. Il décède en 1964 à Paris et est enterré au cimetière des Péjoces, à Dijon. Il est un exemple d’artiste des tranchées puis de poilu qui vivra de son art.
Après 4 ans d’absence (parfois bien plus, pour ceux qui enchaînèrent service militaire et guerre), il fallait retrouver un emploi. Les grands blessés n’étaient pas toujours aptes à reprendre leur métier d’avant-guerre. Les poilus qui se mettent au service de l’art après leur retour à la vie active ne sont qu’une infime minorité. Pour d’autres, ce retour au quotidien est très difficile voire impossible. Le cas des blessés, des mutilés est bien sûr évident mais tous les combattants ont vieilli prématurément, beaucoup souffrent de pathologies diverses qui en emporteront fatalement bon nombre d’entre eux, d’autres gardent des séquelles psychologiques, « shellshock » en anglais ou obusite en français. Cette maladie mentale, due à des excès de peur ou d’anxiété plonge les soldats atteints dans un état mutique, souvent suivi de violents spasmes. Ces hommes ne retrouveront jamais une vie normale, traumatisés par leur expérience combattante, tremblant à la vue d’un képi, ou au son d’un simple claquement de porte.
Pendant la guerre, ces soldats traumatisés étaient renvoyés au front, qu’ils simulent ou non, puis, après le conflit, ils étaient enfermés, subissaient des traitements proches de la torture pour finalement être mis en en isolement et passer en conseil de guerre. Après la guerre, les poilus ont eu un retour difficile à la vie active, à cause de leurs traumatismes et également parce que les femmes se sont émancipées et ont pris leur place sur le marché du travail.
Merci pour l’article, c’est au top et très intéressant 😉