La visite d’un camp de concentration n’étant pas anodine le visiteur s’attend à pouvoir méditer et réfléchir, mais le nombre de visiteurs empêche cela.
Les masses déferlent comme dans un simple parc d’attraction et c’est à cela que le réduisent aujourd’hui les opposants au tourisme dans ce lieu.
De notre expérience, nous avons pu voir des milliers de visiteurs se presser dans les allées du camp ; bien sûr nous avons aussi participé à ce défilé de jeunes gens découvrant les macabres installations. Le tourisme mémoriel permet de faire comprendre aux jeunes générations pourquoi leurs aînés ont ainsi pu commettre ces crimes et pourquoi notre monde est aujourd’hui toujours aussi troublé.
Au-delà de l’aspect mercantile, il apparaît comme malsain de visiter les lieux de la plus grande folie humaine. Jamais plus ces lieux ne seront les mêmes car ils sont marqués par la souffrance d’innocents. La question est de savoir est-ce que ceux-ci accepteraient que certains marchent sur leurs tombes ou se fassent de l’argent sur leur destin tragique au nom du développement économique d’une ville ou d’un pays ?
Comme n’importe quel lieu ayant connu des faits historiques il faut préserver ces vestiges de l’oubli ou de la destruction. Cependant cette conservation doit avoir des fins purement de sauvegarde ; s’obstiner à maintenir en état des monuments pour gagner de l’argent avec, est donc une idée irrecevable. Faire payer aux visiteurs une somme dans le but de sauvegarder quelque chose, n’a rien à voir avec faire payer des visiteurs pour s’enrichir. Il semble qu’à Auschwitz cela soit respecté mais dans d’autres lieux on peut voir des dérives. Cette question se pose donc à Auschwitz comme ailleurs.
Dans un tout autre registre le comportement des visiteurs est très important car celui-ci ne convient pas toujours aux règles du respect et de la décence. Il faut donc laisser de côté tous nos problèmes ridicules car, comparés aux souffrances des détenus, nous ne pouvons pas nous plaindre du moindre problème matériel. Par la même occasion, certains travers de l’homme du XXI° ne sont pas compatibles ; par exemple l’acte selfique -où comment rapporter la visite à soi-même- est la pire insulte pour les victimes et personne ne peut avoir la prétention de se comporter ainsi. Si on pouvait ainsi parler d’un acte isolé alors le problème ne se poserait pas mais ici, comme dans tous les lieux touristiques, se développent les perches à selfie et autres pratiques égocentriques.
Au contraire de l’homme, ces vieux bâtiments n’évoluent pas ; c’est donc à l’homme de s’adapter, de sortir de sa routine narcissique et exhibitionniste. Si on ne peut légiférer contre cela, il faut que l’homme intègre que sa petite personne n’a aucune valeur face à l’Histoire et ses victimes.
Charlélie Baumont