[Documentaire] Le petit morceau de chocolat d’une « petite fille privilégiée » – Yvane Gouas

Francine Christophe est née le 18 août 1933, l’année même de l’arrivée au pouvoir d’Hitler. Comme tous les autres Juifs, elle porte son étoile. Plutôt imposante sur la poitrine d’une enfant de 8 huit ans. C’est pourtant bien à cet âge que cette petite fille  va être déportée. Elle fut enfermée au camp de Bergen-Belsen, et son histoire, sur fond d´horreur et de désastres, est simplement extraordinaire.

Lieutenant dans l’armée française, le père de Francine était prisonnier de guerre; elle et sa mère étaient donc des « privilégiées[1] » puisque les familles des prisonniers de guerre étaient, en théorie, protégées par la convention de Genève. De ce fait, elles ne devaient pas être déportées. Pourtant, après avoir été internées, après leur arrestation[2], dans les camps de Poitiers, Drancy, Pithiviers, Beaune-la Rolande, elles sont transférées à Bergen-Belsen le 7 mai 1944.

Au camp, leur statut de « privilégiées » évite à Francine et à sa mère, le port du matricule, l’habit des camps et la chambre à gaz. Il faut les maintenir en vie, grâce à un léger surplus de nourriture qui ne durera pas longtemps[3], pour qu’elles servent éventuellement  de monnaie d’échange. Et elles survivent, malgré la neige, le froid, la faim et l’épuisement.

 » Je fus une petite fille privilégiée, parce que mon père avait été prisonnier. Et, aussi curieux que cela paraisse, c’est ce qui me sauva la vie. « 

À Bergen-Belsen, la mère de Francine a réussi à cacher deux petits morceaux de chocolat qu’elle garde précieusement  pour les donner à sa fille le jour où elle la sentira vraiment mal. Mais, parmi l’ensemble des femmes déportées, l’une était enceinte. Le jour de l’accouchement, la mère de Francine Christophe lui demanda si elle pouvait donner le petit morceau de chocolat caché dans sa poche car cette pauvre femme en avait plus besoin qu’elle. Francine accepta, le bébé vint au monde et la mère survécut.

Des années après la Libération, lors d’une conférence que Francine Christophe avait organisée sur le thème : « Si l’on avait eu des psychologues à la sortie des camps », une femme médecin psychiatre s’est approchée d’elle en lui tendant un petit morceau de chocolat, et lui a dit: « Je suis le bébé ».

Francine Christophe raconte merveilleusement bien cet épisode du petit bout de chocolat dans le film « Human » de Yann Arthus Bertrand. Je vous conseille de visionner ce passage sur YouTube : https://www.youtube.com/watch?v=ftugbci9ohg

En attendant de rencontrer cette « petite fille privilégiée » au lycée, le vendredi 4 mars à 16H en J 003.


[1] D’où le titre de l’ouvrage de Francine Christophe : Une petite fille privilégiée.
[2] Alors qu’elles tentent de passer en zone libre, elles sont arrêtées en juillet 1942 à la gare de La Rochefoucauld.
[3] Une ration de 1 cm de pain et une noix de gras par semaine, tous les jours, un bouillon clair aux racines terreuses.

Yvane Gouas, première

2 réflexions sur « [Documentaire] Le petit morceau de chocolat d’une « petite fille privilégiée » – Yvane Gouas »

  1. J’ai découvert le témoignage de cette dame dans « Human » et j’ai été bouleversée par cette histoire.. J’ai hâte de l’écouter..
    Merci pour ce résumé de son histoire!

  2. Ein Artikel, der zeigt, dass die Menschlichkeit nie ganz verschwindet, auch nicht im größten Elend. Er macht Mut.
    Ich muss an den großen Humanisten Stéphane Hessel denken, der das KZ Buchenwald nur deshalb überlebte, weil er eine andere Identität von einem Helfer bekam.
    Er ist 2013 gestorben, ich habe ihn noch kennen gelernt, und Ihr kennt ihn durch das Büchlein « Indignez-vous ». Er wäre stolz auf Eure Arbeit gewesen, er hätte alles sehr interessiert verfolgt. Yvane, danke, und bis Sonntag 😉

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