Dimanche 14 février 2016 a eu lieu la commémoration du 72e anniversaire de la « rafle » ou opération de la SIPO-SD, de Cluny. Entre septembre 1943 et avril 1944, soixante-dix-sept personnes -clunisoises ou non domiciliées à Cluny- furent ainsi arrêtées puis déportées.
À cette occasion, Morgane Tomé (1ère S) a lu, en présence d’un nombreux public, le magnifique poème de Catherine Roux, déportée à Ravensbrück : « Après la fouille d’entrée, Ravensbrück, 22 avril 1944. »
Mon Dieu,
Je n’ai plus de vêtements sur moi,
Je n’ai plus de chaussures,
Je n’ai plus de sac, de portefeuille, de stylo,
Je n’ai plus de nom. On m’a étiquetée 35202.
Je n’ai plus de cheveux,
Je n’ai plus de mouchoir,
Je n’ai plus de photos de maman et de mes neveux,
Je n’ai plus l’anthologie où, chaque jour, dans ma cellule de Fresnes, j’apprenais ma poésie,
Je n’ai plus rien. Mon crâne, mon corps, mes mains sont nues.
Le projet « Matricule 35 494 » semble faire débat au sein de la communauté clunisoise. Or, la présence de Morgane aux côtés de René Pernot, président de l’Amicale des déportés, rappelle -ô combien- les élèves s’intéressent, depuis septembre à LA déportation : celle des résistants clunisois, celle des oubliés de l’Histoire -les homosexuels, les Tsiganes- et celle des Juifs.
14 février 2016, stèle des déportés. © C. Clergue
Grâce aux travaux de l’historienne Karinne Rullière, les élèves du projet Matricule ont découvert l’histoire de la famille juive Oferman-Rotbart, assignée en résidence à Cluny de 1942 à 1944. Or, que savions-nous d’eux jusqu’à aujourd’hui ? Rien, si ce n’est que le père -Jacques Oferman- avait été arrêté en 1944. En effet, son nom figure sur la stèle des déportés mais aucune information n’est communiquée à son sujet dans l’ouvrage de référence Le pire c’est que c’était vrai, publié en 2005. Le même constat peut être fait au sujet de Fanny et de Joseph Rotbart, tous deux également déportés, mais également ignorés.
En posant, en présence de l’artiste Gunter Demning, le dimanche 6 mars prochain cinq Stolpersteine en mémoire de la famille juive Oferman-Rotbart, les élèves du projet Matricule seront fiers de montrer aux Clunisois que leur ville est l’une des premières en France à honorer ainsi la mémoire de victimes du nazisme. Et si d’aventure le reproche est encore fait à nos jeunes générations de ne pas se préoccuper du devoir de Mémoire, ces pierres d’achoppement, sur lesquelles le passant posera les yeux, lui rappelleront aussi qu’il a là l’aboutissement d’un travail pédagogique long d’une année, un travail dont les élèves peuvent être également fiers.
Allocution d’Henri Bonniau, (maire de Cluny) qui a salué le travail des élèves du projet Matricule.
© C. Clergue
Le travail de mémoire est important, indispensable pour votre génération, pour qui la deuxième guerre mondiale était au siècle dernier ! Même si bien sûr je suis touchée par l’histoire de ma famille Oferman-Rotbart, il est bien de rappeler que des génocides touchent des minorités visibles et invisibles partout dans le monde encore de nos jours…
Votre génération a encore beaucoup de combats à mener pour une humanité en paix et respectueuse de la spécificité de chacun. Allez, courage 🙂
Bravo aux élèves pour leur investissement au cours de cette cérémonie importante pour l’histoire de la ville et des habitants de Cluny.
Merci pour l´article. Je regrette beaucoup de ne pas avoir pu assister à cette cérémonie. J´étais en déplacement avec 7 élèves de première à ce moment-là. Connaissant Morgane, je pense qu´elle a dû réussir à lire ce texte très fort avec fougue et humanité. Merci à ceux qui étaient là avec Chantal d´avoir pu représenter l´équipe Matricule.
Pour moi, cette commémoration du 14 février, c’est une cérémonie très importante pour les familles de déportés, la commune de Cluny.Nous devons pas oublier ce lundi 14 février 1944.
Je pense aux 200 otages qui ont été relâchés ce jour là. Quelle a été leur réaction en voyant revenir les rapatriés en mai 1945.Encore une grande question.
Vous pourriez lire le livre que j’ai écrit sur mon grand père Jules Pierreclaud, initiateur de la Résistance à Cluny avec son ami Jean Renaud. C’est en ligne sur le site des Archives de Saône et Loire et ça s’appelle: Le Vieux, parcours d’un résistant en Saône et Loire.